Biographie d’Alexandre Dumas.
« Laissez-les me jeter la pierre. Les tas de pierres, c’est le commencement du piédestal ».
Alexandre Dumas est né le 24 juillet 1802 à Villers-Côtterets. Il est le fils d’un général républicain mis en disgrâce, qui mourut en 1806 plongeant les siens dans le dénuement.
Dumas ne reçoit qu’une formation superficielle et doit travailler très jeune. Après avoir été clerc chez un avoué, il vient en 1823, chercher fortune à Paris, sûr de conquérir la capitale. L’année suivante naît Alexandre Dumas fils, enfant naturel de Catherine Labay, couturière. Il reconnaîtra son fils en 1831 et en aura la garde.
Secrétaire du Duc d’Orléans, il écrit des vers et des vaudevilles. Représentée au Théâtre-Français en 1829, sa pièce « Henri III et sa cour » lui valut de véritables ovations. Après bien des avanies au Palais Royal, Dumas devient bibliothécaire adjoint du Duc d’Orléans.
En 1830, seul parmi les grands romantiques, il participe activement d’un enthousiaste fantaisiste à la révolution de Juillet. Il enlève la poudrière de Soissons puis demande à La Fayette de l’envoyer en Vendée Il est atteint par le choléra mais en guérit. Mal vu du pouvoir, il part en Suisse « Impressions de voyages » 1833-1837.
Dans les années qui suivent, le public considère son théâtre presque à l’égal de celui de Victor Hugo. Couvert de breloques, menant une vie trépidante et fastueuse au milieu d’innombrables maîtresses, il enchaîne drames et comédies, gagnant et dépensant avec autant d’aisance. Il arrive assez tard au roman, hésitant entre le genre médiéval « Isabel de Bavière » en 1835 et l’évocation du monde antique « Acté » en 1838.
Il part en 1838 en Belgique, puis sur les bords du Rhin avec Gérard de Nerval. Il rencontre Maquet qui sera son principal collaborateur. Ils publient des feuilletons, et à eux deux, ils produisent pendant 10 ans la meilleure partie de l’oeuvre de Dumas. Elle se place dans la lignée de Walter Scott avec moins de descriptions et de prétentions littéraires, un romantisme moins conventionnel, et plus d’allégresse dans l’action. Le premier succès vient avec « Les Trois Mousquetaires » en 1844, suivi bientôt de « Vingt ans après » en 1845 et plus tard du « Vicomte de Bragelonne » en 1850, dans ce fameux style de cape et d’épée saupoudré de mystère, auquel Eugène Sue avait préparé les voies. Les lecteurs en rêvent, ainsi que des autres romans historiques de Dumas-Maquet, qui refont l’histoire de France avec des personnages les plus marquants du XVIème siècle « La Reine Margot » en 1845 « La Dame de Monsereau » en 1846, « Les Quarante Cinq » en 1848, à la fin du XVIIIème avec « Le Chevalier de Maison Rouge » en 1846 « Joseph Balsamo » en 1848 « le Collier de la Reine » en 1850 « Ange Pitou » en 1851. Une mention particulière est due au « Comte de Monte Cristo » en 1846 qui campe dans un cadre moderne, un archangélique et byronien justicier vengeur de roman noir. Le livre vaut à Dumas une fortune dépensée dans la construction d’un château Renaissance dans un parc anglais. Pour l’inauguration, Dumas invite 600 personnes. Il sera comme Honoré de Balzac, fastueux et ruiné toute sa vie. La demande pour ses feuilletons est telle qu’il embauche de multiples collaborateurs. Mais son énergie reste la même. Jamais il ne s’abstrait de son temps.
En 1848 Dumas défend ses positions politico-artistiques dans son journal « Le Mois ». En septembre, il se présente à la députation en Seine et Oise et dans l’Yonne, mais il est battu. Au coup d’Etat du 2 Décembre il s’exile comme Victor Hugo et Eugène Sue. Il revient à Paris, mais ses romans n’ont plus la race des oeuvres des années 40.
En 1851, Dumas ruiné, s’exile en Belgique pour fuir le nouveau régime et les huissiers. L’année suivante, un jugement prononce sa faillite. La meilleure oeuvre demeure ses « Mémoires » en 1852 – 1854, un roman historique débordant de vie, bâti autour de son propre personnage. En 1853, il revient en France moyennant un compromis financier avec ses créanciers. Dumas écrit dans son journal « Le Mousquetaire » où il veut faire paraître 50 épisodes des « Mémoires ».
Après le procès avec Maquet, en 1857 – 1858 sur leurs oeuvres écrites en collaboration, Dumas part en Russie et dans le Caucase. Il entame une série de voyages, en Italie, où il séjourne pendant 4 ans de 1860 à 1864, puis en Allemagne et en Autriche. Il revient en Bretagne en 1869 et dans le midi, mais Dumas se sent malade et fatigué. L’homme qui signa 500 volumes et se vantait d’être le père réel d’autant d’enfants, meurt chez son fils le 5 décembre 1870 à Puys, près de Dieppe.Il est enterré solennellement à Villers Cotterets.
« Force de la littérature, force de la nature, comme son héros Porthos qu’il aimait tant, il choisit de vivre sa vie. Cette vie foisonnante, luxuriante, parfois criarde, jamais mesquine, tout entière habitée par une généreuse lumière ». Discours prononcé à l’occasion du transfert des cendres d’Alexandre Dumas au Panthéon, le 30 novembre 2002.
Le Château de Monte Cristo sa maison.
Enrichi par le succès des « Trois Mousquetaires », Alexandre Dumas décide, en 1844, de faire construire la maison de ses rêves. Séduit par les paysages du bord de Seine, alors qu’il séjourne à Saint-Germain-en-Laye, Alexandre Dumas acquiert un terrain situé sur les coteaux de Port Marly. En 1844, il achète d’abord deux hectares de champs et de bois sur la colline des Montferrands pour y bâtir sa demeure. Il étend ensuite son domaine en achetant de gré à gré des lopins de terres ou de vignes à des paysans attirés par la prodigalité légendaire de leur illustre voisin.
« Vous allez, ici même, tracer un parc anglais au milieu duquel je veux un château Renaissance, en face d’un pavillon gothique entouré d’eau… Il y a des sources, vous m’en ferez des cascades ». Ainsi, Alexandre Dumas donnait-il les directives à son architecte Hippolyte Durand. Entrepreneur, architecte, décorateurs et sculpteurs se mettent à la tâche, essayant de suivre les directives d’un propriétaire dont les projets évoluent selon son imagination. Enfin, le 25 juillet 1847, après deux années de travaux, Alexandre Dumas inaugure le domaine, en présence de 600 invités qui se pressent dans le parc, admirant le château Renaissance et le pavillon gothique, les cascades, les rocailles et jeux d’eau.
Dès ce jour, Monte Cristo connaît de riches heures : de nombreux domestiques, logés sous les combles, s’empressent de servir la foule de parasites installée au château. Ainsi, écrivains misérables, peintres en mal de commandes ou comédiens en quête d’emploi s’installent presque à demeure, afin de vivre aux dépens du propriétaire des lieux. Sous les ordres diligents du signor Rusconi, le majordome, s’affaire le valet de chambre Paul, abyssin de naissance, surnommé « Eau de Benjoin », pendant que les femmes de chambres dressent les tables, préparent le logis. A l’extérieur se hâte Michel, le jardinier et Alexis, le jeune valet antillais court quérir des victuailles, pour toute la maisonnée. A côté des hommes, les bêtes. Toute une ménagerie familière que Dumas évoque dans « Histoire de mes bêtes », s’ébat dans le parc : des chats, un pointer écossais et sa meute d’amis de tous poils, deux perroquets, un vautour nommé Jugurtha, vivant dans un tonneau, trois singes, des canards, des poules, des paons, une volière, etc…
Comment travailler en paix, lorsque des dizaines d’invités envahissent la demeure, des semaines durant, pour jouir de l’hospitalité et des largesses de leur hôte ? Comment parvenir à noircir, sans relâche, les pages et les pages de romans ou de pièces qui permettront à toute sa maison de mener grand train, s’inquiète Alexandre.
Pour produire, il lui faut s’isoler du joyeux tumulte de ses amis. Aussi, Alexandre fait-il construire sur une pièce d’eau un petit castel néogothique afin d’y aménager son cabinet de travail. Ce petit château, pure expression du style troubadour, tient tant du décor de carton-pâte que du château gothique. Il matérialise l’isolement de l’écrivain, retranché derrière les douves d’opérette et auquel on accède par un gracieux passage, évoquant un pont-levis. Si le domaine veut être une « réduction du paradis terrestre », le cabinet de travail concentre la quintessence de l’imaginaire dumasien. Ses pierres arborent les titres gravés de 88 ouvrages de Dumas. Sur les bas-reliefs qui animent les façades, tout un univers littéraire s’exprime. Ici, Edmond Dantès découvre son trésor, là, un moine chevauchant un âne de La dame de Montsoreau apparaît au dessus d’une fenêtre, le Duc de Guise de Henri III sur la tourelle.
A l’abri des tumultes joyeux de ses amis connus et inconnus, le géant Dumas déploie toute sa puissance de travail, laissant au invités « la maison depuis la cave jusqu’au grenier, l’écurie avec les quatre chevaux, les remises avec les trois voitures, le jardin avec son poulailler, son palais des singes, sa volière, sa serre, son jeu de tonneaux et ses fleurs ». Au château d’If, l’imaginaire devient réalité palpable. Alexandre y a mis son œuvre et sa fantaisie. Cette dernière l’emporte parfois sur la raison architecturale. Ainsi, Alexandre oublie-t-il de prévoir l’escalier ! D’où l’adjonction d’un colimaçon à l’arrière de l’édifice.
Pendant que l’animation est à son comble dans la demeure, l’écrivain se réfugie au Château d’If pour travailler d’arrache-pied. Ces effarantes prodigalités ne pouvaient se prolonger bien longtemps. Les dettes s’accumulent et dès le 2 janvier 1848, un inventaire des biens est dressé, suivi d’une vente de mobilier le 21 mai de la même année. Dumas cède le domaine le 22 mars 1849 pour la somme dérisoire de 31.000 francs, alors qu’il lui avait coûté plusieurs centaines de milliers de francs.
Toitures éventrées, murs rongés par les infiltrations, sculptures lépreuses… Tel est le triste spectacle qu’offre, dans les années 1960, la demeure d’Alexandre Dumas, vouée à disparaître, puisqu’un vaste projet immobilier s’apprête à remplacer la folie de l’écrivain du siècle dernier.
En 1969, les maires des communes de Marly-le-Roi, Le Port Marly et Le Pecq s’opposent à ce programme, soutenus par une campagne médiatique. L’historien Alain Decaux prend la tête de cette croisade. Avec le retrait du projet immobilier, le pire est évité. Grâce à la Société des Amis d’Alexandre Dumas, et au mécénat de la société Manera, le site est sauvé du délabrement. Après les travaux d’urgence menés au château d’If, cabinet de travail de l’écrivain, c’est au tour de la demeure principale d’être mise hors d’eau. La maçonnerie est consolidée et l’on remplace charpente, couverture et menuiserie.
Pour réanimer l’esprit dumasien, il faut désormais se doter de moyens adéquats. Les trois communes décident donc de constituer le Syndicat intercommunal de Monte-Cristo qui acquiert les neuf hectares de propriété, en 1972.
En 1985, le roi du Maroc Hassan II, grand admirateur d’Alexandre Dumas, finance la réfection de la chambre mauresque, seule pièce ayant conservé une partie de son décor d’origine. Le soutien de ce mécène prestigieux permet également d’aménager rez-de-chaussée et premier étage, ainsi que d’installer le chauffage. Les deux pavillons d’entrée, les façades, le deuxième étage du château et le parc, retrouveront un peu plus tard leur apparence d’antan.
Du temps même de Dumas, Monte Cristo ne fut jamais terminé pour des raisons financières. Invités et propriétaires campaient plus qu’ils n’habitaient ce palais inachevé ; Alexandre Dumas fils déclarait en parlant de son père : « Il voulut avoir une maison à lui… et il ne l’a jamais habitée complètement ». C’est pourquoi, le Syndicat intercommunal a pris le parti de ne pas tenter de restaurer, à tout prix, un décor dont on connaît peu de choses, sinon les rares descriptions des invités d’Alexandre Dumas.
La triste litanie des inventaires d’huissiers, publiés lors de la vente du domaine nous renseigne. Ainsi, l’affiche éditée le 21 mai 1848, nous donne quelque idée du foisonnement qui caractérisait la demeure : « des meubles de toute nature, tant modernes qu’antiques, gothiques, Moyen-âge, Renaissance… des meubles de salon et de chambre à coucher en acajou, érable, bois sculpté et doré, marqueterie, piano de neuf octaves et demi… un magnifique lustre en rocaille, des tableaux à l’huile, pastels, aquarelles de Decamps, Delacroix, Boulanger, Jadin, Huet, une voiture dite américaine et du vin de différentes qualités ».
Entre grottes naturelles, sources, ruissellement d’eau et pentes, la topographie du terrain situé à flanc de coteau offrait une géographie si particulière, qu’elle était propice à l’expression de l’imagination littéraire. Aussi, l’atmosphère de l’œuvre romanesque y est-elle encore présente, ainsi que l’écrivain l’avait souhaité : « A Monte-Cristo, je donnerai à chaque allée le nom d’un de mes ouvrages. Ce sera un parc littéraire… »
Il faudra attendre plus d’un siècle pour que le rêve végétal d’Alexandre Dumas reprenne forme. La prise en compte du projet original, les vestiges de la mise en scène voulue par Dumas, et la connaissance de l’art des jardins au milieu du XIXème siècle ont permis de retrouver l’esprit d’origine : création folle, pittoresque, caractérisée par le style éclectique et romantique prisé par les contemporains de l’écrivain.
Lors de la restauration du domaine, des travaux intensifs dégagent le parc, après des décennies d’abandon, d’une prison de broussailles. Sous la houlette de l’architecte paysagiste Alain Cousseran, et du cabinet Signes, d’imposants travaux d’assainissement sont entrepris. Le sol est aplani, drainé, repeuplé de plantes et d’arbres. Le théâtre de verdure, projet cher à l’auteur dramatique, s’échappe des plans d’architectes et des projets d’aménagement pour devenir réalité. Ce cirque verdoyant est prêt à accueillir les pièces de Shakespeare ou celles du répertoire dumasien.
Le chant des cascades, qui charmait tant l’écrivain, retentit de nouveau dans les rocailles. Le jardin retrouve son bassin où Dumas contemplait « les quinze cents goujons, cent ablettes, cent cinquante truites et douze cents écrevisses » achetées, le matin même à Port Marly.
En empruntant le parcours qui mène en bas de la propriété, le visiteur retrouve le bassin du dragon et ses jeux d’eau, où Dumas venait flâner, après avoir visité ses animaux favoris. Sur les pas du maître des lieux, le passant s’aventure à travers les grottes naturelles creusées sur les hauteurs de la propriété, comme si la nature offrait au romancier le décor adapté aux dramatiques aventures de ses héros.
Site officiel du Château de Monte Cristo.
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