Ernest Hemingway – la Finca Vigia
Biographie de Ernest Hemingway.
« J’ai beaucoup appris en écoutant attentivement. La plupart des gens ne sont jamais à l’écoute ».
Ernest Miller Hemingway est né à Oak Park près de Chicago, le 21 juillet1899. Il est le fils de Clarence Hemingway, dentiste, et de Grace Hall, dont le père est un grossiste en coutellerie très aisé. C’est le deuxième enfant d’une famille qui en comptera six : Marceline, née en 1898, Ursula, née en 1902, Madeleine née en 1904, Carol, née en 1911, Leicester Clarence, né en 1915, et Ernest.
En 1900, Clarence et Grace font construire un chalet, surnommé « Windemere » au bord du lac Willon, à Hortons Bay, dans une région habitée par les indiens Ojibways. Clarence initie très tôt son fils à la chasse et à la pêche. En 1909, son père lui offre son premier fusil de chasse, pour son 10ème anniversaire.
A partir de 1913, Ernest étudie à la High School d’Oak Park. Il découvre Shakespeare, Dickens, Stevenson, et participe activement à la vie sportive et culturelle de son école. En 1916, ses premiers « contes et poèmes » paraissent dans Tabula et Trapeze, des revues littéraires de l’école. Après avoir obtenu son diplôme en 1917, Hemingway renonce à suivre des études universitaires pour devenir journaliste au Kansas City Star, sous l’influence bienveillante de son oncle paternel, Alfred Tyler Hemingway.
Lors de l’entrée en guerre des États-Unis le 6 avril 1917, l’incorporation d’Hemingway est refusée une première fois à cause d’un œil défaillant. En avril 1918, il parvient cependant à incorporer la Croix-Rouge italienne et après avoir traversé l’Atlantique sur le Chicago, il débarque à Bordeaux, gagne Paris puis Milan, où il arrive le 6 juin. Après plusieurs semaines passées à l’arrière, il rejoint le front. Le 8 juillet, un tir de mortier le blesse aux jambes, tue un de ses camarades et en blesse grièvement deux autres. Alors qu’il tente de ramener un camarade vers l’arrière, il est de nouveau blessé par un tir de mitrailleuse, mais parvient à un poste de secours, avant de s’évanouir. Pendant sa convalescence de trois mois dans un hôpital de Milan, il s’éprend d’une jeune infirmière américaine, Agnes Von Kurowsky, qui lui inspirera le personnage de Catherine Barkley dans « L’Adieu aux armes« . Il se marie en 1921 avec sa première femme, Hadley Richardson. Ses premiers grands textes sont ceux d’un aventurier attiré par le danger : « Le Soleil se lève aussi », de nombreuses nouvelles… Il prendra part comme journaliste à la guerre d’Espagne, aux côtés des Républicains (« Pour qui sonne le glas », roman qui le rend célèbre), puis à la Seconde Guerre mondiale, participant au débarquement des Alliés en Normandie, et à la Libération de Paris. Les carnages dont il est témoin le convainquent de la vacuité et du mensonge du langage abstrait.
Conséquence de son expérience sur les champs de bataille, il supprime de son écriture tous les mots inutiles, simplifiant la structure de la phrase et se concentrant sur les objets et les actions concrètes « Ce qu’il faut, c’est écrire une seule phrase vraie. Écris la phrase la plus vraie que tu connaisses ». Il adopte une éthique qui met l’accent sur le courage face à l’adversité, ses héros sont des hommes forts, silencieux, et très curieux des femmes.
Son talent narratif fait de lui l’un des écrivains majeurs du XXe siècle. Son œuvre est couronnée par le prix Nobel de littérature, en 1954 il donne devant le jury le discours le plus court de cette institution.
Se sentant devenir aveugle et touché par la folie, il se suicide en 1961 – lui qui avait toujours blâmé son père pour son suicide, considérant cela comme un acte de lâcheté.
La Finca Vigia sa maison.
La propriété La Finca Vigia fut construite en 1887 par l’architecte catalan Miguel Pascual y Baguer, sur un terrain occupé autrefois par une caserne de vigilance de l’Armée espagnole. D’où son nom. Au début du XXe siècle, la propriété fut vendue au Français Joseph D’Orn Duchamp, qui l’achète dans le but de la louer.
Ernest Hemingway, vint à Cuba en 1932 pour participer à un tournoi de pêche à l’espadon. Ses visites se firent dès lors fréquentes. A son retour de la guerre civile espagnole, il s’établit pour quelque temps à l’hôtel havanais Ambos Mundos. En avril 1939, à l’instance de sa troisième épouse, Martha Gellhorn, il loua La Vigia, puis l’acheta le 28 décembre 1940. En 1943, il emmena vivre dans cette résidence sa quatrième épouse, Mary Welsh, avec qui La Vigia devint le refuge par excellence de l’écrivain. Il y demeura jusqu’en 1960, date de son dernier séjour à Cuba.
Le 2 juillet 1961 il se suicida. Conformément à la volonté de l’écrivain, Mary Welsh fit don de la propriété au Gouvernement révolutionnaire de Cuba, qui décida de la transformer en musée, inauguré le 21 juillet 1962.
La villa coloniale où Ernest Hemingway vécut pendant 21 ans, est en phase accélérée de rénovation sous l’égide d’experts cubains et avec l’appui de collègues américains.
Ces spécialistes ont déjà terminé la façade et s’efforcent de redonner le lustre d’antan à cette maison musée, enfouie dans la végétation près du village de San Francisco de Paula, à 25 km de La Havane, sans effacer les traces laissées par Hemingway lorsqu’il l’occupa entre 1939 et 1960.
La villa, construite à la fin du XIXe siècle, est déjà restaurée à 30 % et le projet est qu’elle soit terminée fin 2008, a indiqué l’architecte en charge du chantier Enrique Fernandez qui est appuyé par 30 spécialistes cubains.
Décorée avec goût, la villa convertie en musée en hommage à Hemingway sur ordre du président Fidel Castro en 1961, y expose des livres, disques et meubles, peintures, ayant appartenu à l’écrivain, ainsi qu’une radio, un tourne-disque et des animaux empaillés. Des photos montrent aussi sa passion pour la pêche au gros, la chasse et la boxe.
« C’est une restauration cruciale, garantie pour les 20 ans à venir. Nous avons traité le bois contre les termites et nous devons aussi lutter contre l’humidité et le soleil », a expliqué M. Fernandez.
A propos de deux cyclones qui frappèrent le chantier en 2005, l’architecte raconte que certaines personnes ont alors dit que « Hemingway ne voulait sans doute pas qu’on rénove les lieux ». « Pourquoi ne le voudrait-il pas ? C’est sa maison tout de même ! », rétorque l’architecte.
Seuls 27 % des matériaux d’origine ont été modifiés au cours de la restauration qui comprendra aussi la piscine, le colombier, les jardins, les sentiers et le yacht El Pilar, selon Manuel Palacios, Conseiller national du patrimoine culturel.
Le projet piloté par cet organisme et réalisé par l’entreprise de restauration du Bureau de l’Historien de La Havane, coûtera 1,2 million de dollars.
Les frais sont assumés par Cuba puisqu’en vertu de l’embargo de Washington à l’encontre de l’île depuis 45 ans, aucune institution américaine ne peut le financer.
Ada Rosa Alfonso, directrice du musée, souligne que l’organisation non gouvernementale américaine National Trust of Historic Préservation était volontaire. « C’est l’une des nombreuses absurdes conséquences de l’embargo », déplore Mme Alfonso, au milieu des palmiers, ficus et autres tulipes africaines à fleurs orange qui agrémentent la propriété.
Hemingway a écrit dans cette villa plusieurs livres dont son plus célèbre roman « le Vieil homme et la mer » pour lequel il reçut en 1954 le Prix Nobel de littérature. Massif avec ses 1,82 mètres de haut, il était obsédé par son poids et le mesurait plusieurs fois par jour, inscrivant le résultat sur le mur d’une salle de bains de la villa.
Pour la directrice du musée, le legs de Hemingway devrait être commun aux Etats-Unis et à Cuba : « le dieu de la littérature nord-américaine se sentait Cubain et c’est une marque de distinction de Cuba dans le monde ».
Des experts américains sont venus à trois reprises en 2006 sur l’île pour un échange d’opinion avec des homologues cubains. Un accord signé en 2002 entre le Conseil de recherche en sciences sociales américain et le Conseil du patrimoine culturel de Cuba prévoit la restauration et numérisation de 11 000 livres, lettres, revues et autres écrits de Hemingway. Quand ce processus sera terminé, des copies seront remises à la bibliothèque John F. Kennedy du congrès américain.
Les travaux de restauration ont en outre ouvert la voie à de nouvelles recherches sur la vie de l’écrivain nord-américain.
On a en effet retrouvé des notes inédites laissées par l’auteur du « Vieil homme et la mer » sur l’un des murs de la salle de bains de ce qui fut sa résidence la plus stable, hors les États-Unis.
La genèse de ce genre de découverte est bien connue: on avait repéré sur un document appartenant au fonds photographique de l’institution un portrait d’un Hemingway vieilli qui écrivait sur un mur de la salle de bains de la maison, à côté d’une balance.
Les recherches furent alors entreprises par l’archéologue cubaine Elisa Serrano. Les notes que l’on pouvait apprécier sur l’image avaient été écrites dans la deuxième moitié des années 50, c’est-à-dire peu avant son départ de Cuba qui, comme on le sait, eut lieu en 1960.
Des spécialistes du musée avaient également retrouvé une photo où on le voit plus jeune, au pied de la balance, dans la salle de bains. On pouvait y apprécier des notes jusque là inconnues.
Inaury Portuondo, spécialiste du musée, explique que les recherches ont été faites à la faveur des travaux de restauration : des parties de texte écrites au crayon ont été retrouvées, et le travail à proprement parler archéologique a alors commencé.
Les nouvelles notes comportent notamment le relevé de son poids, auquel il procédait quotidiennement, en toute discipline, et qui constitue comme un témoignage, laissé volontairement ou non, de sa présence à La Vigia. Mais d’autres notes concernent des aspects de sa vie publique, et même de ses voyages. Il fait figurer au bas de chacune ses initiales, à manière de signature.
A en juger par les objets personnels qu’il y laissa, on peut partager le point de vue de certains spécialistes ou admirateurs de Hemingway: il quitta la Vigia avec l’idée d’y revenir.
Il y avait abandonné notamment sa machine à écrire Underwood, sur une étagère devant laquelle il passait des heures à écrire, debout et pieds nus, des lunettes à monture métallique, son tampon « Je ne réponds jamais aux lettres », un disque de Glenn Miller sur le gramophone et d’autres de Debussy, Stravinsky, Schubert, Bach et Beethoven sur l’étagère, ses plus de 8 000 livres, un bon millier de lettres, et ses précieux trophées de chasse.
Il ne revint pas et se suicida loin de La Vigia, comme pour ne pas laisser en ce lieu de tristes souvenirs. Mais là, au sommet d’une colline d’où il pouvait contempler les eaux du Gulf Stream dans un environnement paisible, bercé par le murmure des bambous, entouré d’une flore luxuriante et variée, la demeure se maintient pratiquement telle que la laissa le Prix Nobel de littérature 1954. Ce refuge champêtre où furent conçus « Le Vieil homme et la mer », « Paris est une fête », une bonne partie de « De l’autre côté du fleuve et sous les arbres », et « Iles à la dérive » donne encore l’impression d’être habité.
Ces objets personnels sont soigneusement conservés dans la propriété qui, dès 1962, devenait la première institution du monde à servir la cause de la divulgation de la vie et de l’œuvre du célèbre écrivain nord-américain. Oui, c’est bien un musée, mais sans vitrines.
La salon conserve son mobilier original: le porte-revues, son fauteuil préféré, le tapis de fibres végétales qui couvre le sol; d’impressionnantes têtes d’animaux sur tous les murs: le grand kudu de la salle à manger, le lion et le léopard de sa bibliothèque, le buffle de sa chambre qui lui servait aussi de lieu de travail, et une antilope qu’il avait lui-même chassée dans les montagnes d’Idazo.
Les meubles de la salle à manger n’ont pas changé : on y retrouve la table à laquelle il accueillit aussi bien ses amis de San Francisco de Paula que d’illustres célébrités du cinéma et de la littérature mondiale. La bibliothèque conserve elle aussi son mobilier et en particulier un pouf rond au centre, acheté au Caire. Sa chambre est une sorte de musée intime: le lit où s’éparpillent livres et revues, la table de travail où il entassait des objets divers, ses grands mocassins aux semelles usées, ses costumes de chasse, une collection de dagues nazies, des fusils et des cannes à pêche et bien d’autres objets originaux.
Les constructions extérieures sont aussi imprégnées de cette mystérieuse présence qui hante chacun des objets ayant appartenu à l’illustre propriétaire de la belle demeure havanaise et chacun des lieux qu’il fréquentait. Le yacht Pilar occupe une partie de son court de tennis, sur un côté de la piscine, en contrebas, le cimetière qu’il avait lui-même aménagé pour ses chiens, le garage à l’autre extrémité.
L’architecte Enrique Hernandez Castillo, chef du projet, est formel: tout est pratiquement terminé et en parfait état de conservation.
Le toit original comporte deux systèmes de construction: l’un fait de poutres et de planches avec un faîte, et l’autre de tiges métalliques et de plaques de béton. Les restaurateurs se sont rendus compte dès le début qu’il leur manquait des linteaux à poser au dessus des portes et des fenêtres, qui dans le cas de cette maison sont nombreux, ils ne disposaient pas plus du matériel servant à éviter les effondrements. Toutes ces structures ont été fabriquées, et le toit de la chambre de Hemingway a ainsi pu être totalement restauré, précise Hernandez Castillo. Les deux pentes du toit ont été totalement refaites pour en garantir la durabilité. Le bois de cèdre a été apporté des forêts de l’Escambray: il a été coupé et séché pendant deux ans, puis traîté pour éviter l’invasion de termites. Les faux plafonds de plâtre ont aussi été refaits, car les poutres qui les soutenaient étaient en mauvais état. De nouvelles solutions ont été conçues et appliquées pour l’écoulement des eaux de pluie, afin d’éviter de nouvelles infiltrations, qui ont toujours constitué un grave problème, même du temps où la demeure était habitée par l’écrivain, aux dires du spécialiste du Centre national du Patrimoine. La maison a été repeinte de couleur jaune ocre, comme au temps où vivait le « Dieu de bronze » de la littérature nord-américaine. Le carrelage de la salle à manger et du salon a été remplacé par des carreaux trouvés sous celui de la cuisine et du lavoir.
Il a fallu procéder à un travail ardu d’assainissement phytosanitaire, car les trois types existants de termite ont été trouvés dans les environs de la maison. La charpente a été remplacée à 90%, précise Enrique Hernandez.
Si la demeure bénéficie tous les deux ou trois ans de l’entretien nécessaire, les travaux effectués par le Centre national du Patrimoine culturel et le Bureau de l’Historien de La Havane sont garantis pour une durée de vingt-cinq ans. Le coût total s’est monté à plus d’un million et demi de pesos et deux cents mille dollars, informent les investisseurs.
Le musée est en ce moment ouvert au public, même si les ouvriers et les spécialistes s’y trouvent encore au travail: ils restaurent actuellement le yacht Pilar, propriété de Hemingway, qui fut donné en 1962 par son patron, Gregorio Fuentes. La tour voisine de la maison sera elle aussi repeinte en jaune ocre, et son toit retrouvera son aspect initial. Les restaurations du toit avaient consisté jusqu’à présent à poser de nouvelles tuiles sur les anciennes: il y en avait trois couches. Les toilettes ont été agrandies et dotées d’un nouveau système de plomberie et de charpente.
Le premier étage de la tour, qui compte trois niveaux, était le refuge des 57 chats de l’écrivain. À la fin des travaux, elle servira de salle d’exposition transitoire et de lieu de conservation des fonds qui ne sont pas exposés: des documents très personnels, ou les vêtements de son épouse, par exemple. Le deuxième étage rouvrira ses portes avec une salle sur le thème de la pêche, qui est curieusement peu présent dans la grande demeure. Au troisième étage se maintiendra ce que Hemingway appelait sa « bibliothèque de guerre ».
Selon le chronogramme établi pour la restauration, réparation et entretien de pratiquement tous les espaces de la demeure, c’est fin 2008 que la propriété où Hemingway passa près de la moitié de sa période la plus active production littéraire aura retrouvé toute sa splendeur.
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