Biographie de François Rabelais.

 

Francois_Rabelais« Le jus de la vigne clarifie l’esprit et l’entendement ».

 

François Rabelais est né en 1483 à Chinon (ou 1494), il est vite gagné par la passion de l’étude. Mais issu d’une famille désargentée, il entre en 1510 en tant que novice au couvent franciscain de la Baumette à Angers. Peu en harmonie avec les règles de cet ordre, il est autorisé à rejoindre les cordeliers, mais ces derniers inquiets de le voir traduire des manuscrits grecs et de correspondre avec le grand helleniste de son temps, Guillaume Budé, l’envoient chez les bénédictins. Il se rend à Paris pour apprendre la médecine, et devenu moine séculier, il fait deux enfants à une veuve, qu’il oubliera bien vite.

Diplômé de la faculté de Montpellier en 1532, il se rend à Lyon pour exercer son métier à l’Hôtel-Dieu. Il se lie d’amitié avec le cardinal Jean Du Bellay qui deviendra son protecteur (des quatre frères Du Bellay aucun ne passera à la postérité, seul un neveu, Joachim, fondera avec six autres poètes le célèbre groupe de la Pléiade). Il est ainsi l’homme de compagnie, savant, distingué, raffiné et intelligent qui sait instruire les grands en les divertissant.

Rabelais est aussi un homme qui aime le peuple et qui veut soigner ses souffrances. Il exerce la médecine avec succès, et n’hésite pas à montrer son humanité. Il fréquente les malheureux, les exclus et écrit des almanachs, oeuvres populaires qui reprennent les dictons, les histoires appartenant à la tradition orale. Il est féru d’anatomie et comme beaucoup de scientifiques à l’époque, il pratique ses expériences sur des cadavres de pendus, au risque d’être pendu lui-même. Il suit Jean Du Bellay à Rome et, passionné aussi de botanique, il rapporte des graines étranges: la France grâce à lui découvre le melon, l’artichaut, les oeillets et la salade dite « romaine ».

Rabelais a une faiblesse : la soeur de François Ier, Marguerite de Navarre, auteur célèbre de l’Heptaméron, et de poésies. Cette femme intelligente (elle insipre sa politique à son frère) et délicate lui rappelle la dame à la Licorne des tapisseries, et sa fraîcheur lui fait oublier un moment les horreurs de son temps. En effet, vers 1520, la France est agitée par les intrigues religieuses entre le catholique espagnol Charles Quint, le protestant anglais Henri VIII et l’indépendant français François Ier. Au Vatican les papes se succèdent sans cohésion, voire parfois sans religion. C’est une époque sombre où la misère règne, la maladie frappe, notamment la grande vérole (nom familier de la syphilis), qui emportera François Ier, le roi chéri de Rabelais. C’est le début de la Réforme menée par Luther en Allemagne, reprise par Calvin de façon plus austère dès 1534 en France. Période de mutation, de transition douloureuse.

En 1532, Rabelais reprend le personnage de la tradition populaire, Gargantua ( dont le livre les « grandes et inestimables chroniques de l’énorme géant Gargantua » a été écrit en 1532) et lui invente un fils Pantagruel. De là il publie sous le nom d’Alcofibras Nasier « les Horribles et épouvantables faits et prouesses du très renommé Pantagruel, roi des Dispodes, fils du grand géant Gargantua ». En 1534, il narre les exploits du père, Gargantua.

Derrière Gargantua il faut voir François Ier et sous les traits de Picrochole l’irascible guerrier, deviner Charles Quint. Les combats entre le géant et le ridicule va-t’en-guerre (étymologiquement, Pichrocole siginfie « bile amère ») font revivre le conflit existant entre les deux grandes puissances. Les deux oeuvres plaisent à François Ier car elles lui permettent de mettre en Europe les rieurs de son côté, et en ces temps d’Inquisition meurtrière, se moquer de son ennemi est une arme politique.

Ce n’est qu’en 1542 que Rabelais remet « Pantagruel » et « Gargantua » dans l’ordre et signe de son nom. En 1543 les deux oeuvres sont censurées, jugées scandaleuses. Les théologiens et autres pédagogues de la Sorbonne ne goûtent pas la critique rabelaisienne. On reproche à Rabelais son style grossier, (l’utilisation du français langue populaire au lieu du latin est jugée déplacée), son vocabulaire outrancier, ses obsessions du corps et de toutes ses fonctions plus ou moins basses. C’est oublier que Rabelais est médecin, qu’il cherche à concilier corps et esprit, à réhabiliter ce qui fait que l’on est homme : fornication, beuverie, gueuletons, tout doit être pratiqué, sans fausse pudeur. Le géant est en réalité un homme nouveau, assoifé de tout connaître, figure d’un nouveau modèle à suivre.

Car Rabelais est en colère. Derrière ses outrances le lecteur perçoit l’écoeurement de l’humaniste qui voit tous les jours la tyrannie, qu’il est lui-même obligé de fuir, les excès de violence pratiquée au nom de Dieu, le luxe et la luxure pratiqués au Vatican par ses Papes successifs qui vivent en concubinage et font des batards, oublieux des préceptes fondamentaux de la Sainte Ecriture. Rabelais n’est pas un prude, mais il y a des limites : en homme qui aime profondément le genre humain, il dénonce cette Eglise qui s’est perdue, gâtée et il veut la réformer de l’intérieur, à sa façon, sans fonder à son tour une nouvelle Eglise (ce qu’il reprochera à Calvin, à Henri VIII par exemple). Il veut faire rire, rire pour dénoncer, rire pour corriger, rire aussi pour ne pas pleurer.

« Amis lecteurs, qui lisez ce livre/  Quand je vois le deuil qui vous mine et consume :/ Il vaut mieux écrire du rire que des larmes,/ Parce que le rire est le propre de l’homme./ VIVEZ JOYEUX. » (Aux lecteurs, Gargantua)

En 1546, Rabelais obtient un privilège royal pour éditer le « Tiers Livre » (suite des aventures de Pantagruel, Panurge et des autres compagnons). Le nombre d’ennemis augmente et l’écrivain est réduit à sollisciter protection chez les puissants qui aiment sa verve. De château en château, de chemin et chemin, Rabelais parcourt la France, craignant toujours les foudres de la Sainte Eglise.

Après la mort de François Ier, son fils Henri II, nouveau roi, cherche à s’attirer la bonne plume de l’écrivain, et à travers lui, les rieurs. Jean Du Bellay et d’autres amis incitent Rabelais à poursuivre son oeuvre. Celui-ci se laisse convaincre et rédige le « Quart Livre » en 1552, qui plaît  beaucoup au jeune roi. Mais les temps commencent à changer. Diane de Poitiers, les Guise et le clan des catholiques, Ronsard en tête, ont pris de l’importance et les attaques contre la papauté ne sont plus aussi bien vues. Le roi Henri II et le Pape se réconcilient. Rabelais est alors « laché » par ses protecteurs, le cardinal Jean Du Bellay en premier qui doit sauvegarder sa place à Rome. Le « Quart Livre » est censuré par les théologiens, le pouvoir royal ne le soutient plus.

Rabelais se retire alors à Paris, où il vit dans une misérable masure, ressassant ses souvenirs, ses amitiés d’un autre temps. La mort viendra le chercher rapidement et il sera enterré le 9 avril 1553 à l’église Saint-Paul.

 

La Devinière sa maison.

 

 

La_Devini_reFrançois Rabelais est né en 1483 dans une métairie perdue dans la campagne vallonnée de Chinon : La Devinière. Désormais, le lieu abrite un musée en l’honneur de l’écrivain, de ses écrits et de son engagement humaniste.

L’accès à la demeure de l’écrivain est bucolique. C’est un petit chemin grimpant, bordé de noisetiers, que notre saint homme emprunta à maintes reprises. Ne serait-ce que pour trouver l’inspiration dans le paysage environnant, le miel de son existence. Ses ouvrages en attestent, et vont bien au-delà, nous informant de son quotidien, au jour le jour, ou presque…

Derrière l’apparence du délire verbal, le Chinonais nous apprend qu’il n’est pas né à « La Devinière », mais vraisemblablement non loin de là, dans la prairie de la Saulaie, où Gargantua… a vu le jour.

Cette métairie fut construite par Antoine Rabelais, le père de l’écrivain, à la fin du XVe siècle. Toutefois, le bâtiment le plus imposant à première vue date du XVIIe, il s’agit d’un pigeonnier. A l’arrière de celui-ci, on trouve les deux principales salles du musées : la grand’ salle et la chambre.

La première est consacrée essentiellement à l’environnement qui a inspiré l’auteur pour ses principaux ouvrages : « Gargantua », « Pantagruel »… et aux représentations de Rabelais. On y trouve notamment une esquisse de l’auteur par Matisse. La cheminée aux dimensions rabelaisiennes conserve encore le grillé des châtaignes des veillées d’hiver. C’est une pièce modeste en vérité, que le père de Rabelais réservait aux domestiques.

La grand chambre, dotée de meubles du XVIIe siècle, est parcourue d’illustrations. Une petite chambre y est accolée. Dans cette dernière, sur le bord de la fenêtre, on découvre des graffitis qui seraient de la main de l’auteur : 08 aprilis 1509. Cette date correspondrait au jour de son départ de la Touraine.

Le domaine s’étend par ailleurs au-delà des murs. A gauche de l’entrée, on peut rejoindre quelques rangs de vigne récemment plantés et admirer le château du Coudray-Montpensier (XVe siècle).  A l’opposé, un jardin accueille lesplantes médicinales et alimentaires citées dans les écrits de Rabelais.

Enfin, sous ce jardin, de grandes caves sont régulièrement investies par des expositions temporaires, souvent interactives. Issues de l’extraction du tuffeau blanc qui compose les bâtiments, ces galeries permettent de découvrir le visage souterrain de la vallée. En effet, ce type de caves peuple les environs.

          

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