Biographie de Jane Austen.
« Pourquoi ne pas profiter immédiatement des plaisirs ? Combien d’instants de bonheur ont été gâchés par trop de préparation » ?
Née en 1775, dans le village de Steventon, dans le Hampshire, Jane Austen est l’avant-dernière et deuxième fille d’une fratrie de huit enfants. Son père, George Austen, est pasteur, sa mère, Cassandra Austen née Leigh, compte parmi ses ancêtres sir Thomas Leigh qui fut lord-maire au temps de la reine Elisabeth. Les revenus de la famille Austen sont modestes mais confortables, leur maison de deux étages et un grenier, le Rectory, est entourée d’arbres, d’herbes ainsi que d’une grange.
De la jeune Jane Austen on sait que comme la plupart des héroïnes de ses romans, elle pouvait parfois préférer battre la campagne ou se rouler dans l’herbe du haut d’une pente ; en compagnie de son frère Henry (d’un an son aîné) ou de sa sœur Cassandra elle vivait là des activités moins convenables pour une fillette de l’époque que de coudre, jouer du piano, ou chanter.
L’éducation de Jane ne diffère pas de celle donnée à toute jeune fille de Grande-Bretagne du XVIIIe siècle, elle consiste en occupations artistiques et ménagères, indispensables pour la préparer à son avenir, le mariage. De fait, elle apprend le français et l’italien, le chant (sans enthousiasme), le dessin, la couture et la broderie, le piano et la danse. Evidemment, de toutes ces activités, sa préférée est de loin la lecture. Les petits Austen avaient également pour passion le théâtre, la grange, l’été, leur servait de scène.
En 1782, Cassandra et Jane (qui dès lors ne se quittèrent plus de leur vie) furent envoyées à l’école, d’abord à Oxford, puis à Southampton, enfin à l’Abbey School de Reading. Les études leur laissaient beaucoup de temps libre, puisque les fillettes n’avaient qu’une ou deux heures de travail chaque matin. De retour au Rectory, les deux sœurs complétèrent leur éducation grâce aux conversations familiales et à la bibliothèque paternelle qui était remarquablement fournie et à laquelle elles semblent avoir eu un accès sans restrictions.
La famille Austen est friande de romans, qui paraissent à cette époque par centaines. De plus, tout le monde a pour loisir l’écriture : M. Austen rédige ses sermons, sa femme, des vers, les frères, tous anciens étudiants d’Oxford, des essais pour les journaux étudiants de l’université, tous touchent au théâtre. Jane Austen commence très tôt à écrire, encouragée par l’exemple familial. Elle s’oriente vers le récit, s’inspirant des romans sentimentaux qui constituent le fonds des bibliothèques. Les œuvres de jeunesse qui ont été conservées, copiées à la main en trois cahiers intitulés Volume I,II et III, ont été écrites sans doute entre la douzième et la dix-septième année de l’auteur.
En 1795, Jane Austen commence un roman intitulé « Elinor et Marianne », première version de ce qui allait être « Raison et sentiments« . Dans la foulée, elle écrit « First Impressions », qui deviendra « Orgueil et préjugés ». Enfin en 1798, elle écrit « Northanger Abbey« , sous le premier titre de « Susan ». Ces trois romans majeurs sont écrits entre vingt et vingt-cinq ans. Son père tente de faire publier « First Impressions », sans succès. Les œuvres de Jane Austen ne sortent pas du cercle familial pour le moment.
En 1800, M. Austen décide de quitter le Hampshire pour se retirer à Bath avec sa famille. Jane, à qui la vie à la campagne plaisait tant, n’aima pas être confinée dans cette ville. Elle écrit peu à cette période de sa vie, elle entreprend en 1805 un roman qu’elle abandonne en cours de route, « The Watsons », mais malgré cela, Bath joue un rôle important dans son œuvre. Deux de ses romans se déroulent en grande partie à Bath, « Northanger Abbey » et « Persuasion », la ville, autant que les habitudes de ses habitants et résidents de passage (Bath est célèbre pour ses thermes), y sont dépeints avec précision.
Le 21 janvier 1805, la mort de M. Austen met les femmes de la famille dans une situation peu confortable. Comme souvent au XIXe siècle au Royaume-Uni, elles devront dépendre de la générosité des frères Austen. Et il faut pour Cassandra et Jane abandonner tout espoir de mariage, et connaître le destin fréquent de bien des femmes de l’époque : être vieilles filles. Dear Aunt Jane s’occupe ainsi de ses nombreux neveux et nièces, les distrayant et les éduquant à l’occasion.
En 1808, les trois femmes quittent Bath et s’installent, après des passages à Southampton et à Clifton, dans le village de Chawton, entre Salisbury et Winchester. C’est là que l’œuvre de Jane Austen telle qu’elle est connue a été écrite.
En 1809, Jane Austen parvient à racheter le manuscrit de « Susan », autrefois vendu à l’éditeur Crosby. Puis deux ans plus tard, « Raison et sentiments« est accepté par l’éditeur londonien Thomas Egerton. La première édition, d’un peu moins de mille exemplaires, est écoulée en vingt mois, et Jane peut compter sur de nouveaux revenus, inespérés pour quelqu’un habitué à vivre très modestement. Comme il est d’usage pour les auteurs féminins, l’ouvrage paraît anonymement. Coup sur coup, Jane se met à la révision d’« Orgueil et préjugés« et à l’écriture de « Mansfield Park ». « Orgueil et préjugés« eut à sa sortie un succès encore plus grand.
« Emma » est le deuxième ouvrage écrit à Chawton, et sera tiré en première édition à 2000 exemplaires. Désormais, l’auteur peut se permettre une plus grande indépendance financière alors même que les affaires de son frère Henry périclitent. « Emma » reçut encore une fois un excellent accueil et valut à Jane Austen un admirateur de premier rang en la personne de sir Walter Scott. De plus, le prince régent, à qui « Emma » était dédicacé, lui fit demander si elle accepterait d’écrire un roman historique sur la maison de Coburg, affiliée à la fille du prince régent, l’auteur déclina l’offre.
Le 8 août 1815, Jane commence l’écriture de « Persuasion« , qu’elle ne verra pas publié de son vivant. En effet, avant l’achèvement de son dernier roman, elle contracte la maladie d’Addison, une dégradation chronique des glandes surrénales, encore non identifiée à cette époque (il faudra attendre 1855) et souvent causée par la tuberculose. En 1817, pour se rapprocher de son médecin, le docteur Lyford, elle s’installe à Winchester dans une rue proche de la cathédrale. C’est là qu’elle meurt, le 18 juillet 1817, à l’âge de 41 ans, laissant un roman inachevé, « Sanditon ».
Elle est enterrée dans la cathédrale de Winchester.
On sait relativement peu de choses d’elle, surtout tout ce qui est extérieur à sa carrière de romancière. On n’a que deux portraits d’elle, tous deux dessinés par sa sœur Cassandra, et un des deux est une vue de dos. Comme seule description d’elle, on a une phrase d’un ami de la famille la décrivant comme « belle, petite et assez élégante ».
Les deux sœurs sont restées toute leur vie durant extrêmement proches, ceci renforcé par le fait que ni l’une ni l’autre ne s’est mariée. C’est par leur correspondance que l’on trouve la plus grande source d’informations sur Jane Austen, mais ces lettres ne nous renseignent que sur les périodes où les sœurs étaient séparées, ce qui était assez rare. De plus, au désespoir des admirateurs de l’auteur, Cassandra, qui lui survécut, détruisit une partie de cette correspondance, voulant éviter d’exposer l’intimité de sa sœur dont la célébrité allait grandissant. Ainsi beaucoup de mystère subsiste quant à la vie sentimentale de celle qui s’amusait tant à décrire les émois naissants d’une Elisabeth Bennet « Orgueil et préjugés » ou d’une Marianne Dashwood « Raison et sentiments » dans la campagne britannique pré-victorienne. On sait qu’elle accepta une proposition de mariage d’un riche propriétaire du nom de Harris Bigg-Wither, frère d’un de ses amis. Mais elle annonça le lendemain matin qu’elle avait changé d’avis, et partit avec Cassandra rejoindre un de leurs frères à Steventon sans donner plus d’explications.
Jane Austen fait partie de la petite noblesse provinciale du Royaume-Uni du début du XIXe siècle. C’est le cadre qu’elle donne à ses romans. Loin des passions frénétiques des œuvres des Brontë, son œuvre dépeint les relations entre jeunes miss et prétendants, analyse finement les hésitations, préjugés et autres élans du cœur jusqu’à la naissance du sentiment amoureux. A la veille des révolutions industrielles et économiques qui bouleverseront le paysage, et alors que les échos de Waterloo et Trafalgar annoncent la montée en puissance d’un empire britannique, le monde de Jane Austen appartient déjà à un autre siècle. C’est une société qui influence fortement les individus par les conventions sociales, notamment par le mariage. La femme ne peut hériter de son père ou de son mari, et bien des domaines passent aux mains d’un cousin lointain, faute d’héritier mâle. Seul le mariage met à l’abri de tels revers de fortunes. La vie sociale des villages et petites villes de province s’organise autour des bals. C’est d’ailleurs l’une des seules occasions pour les jeunes gens de cette classe sociale de se rencontrer, c’est aussi, comme on le voit dans « Northanger Abbey« ou « Orgueil et préjugés », le lieu de toutes les espérances matrimoniales.
Chawton sa maison.
Chawton est un charmant petit village situénon loin de Winchester, dans le Hampshire. C’est là que Jane Austen vécut les huit dernières années de sa vie.
A la mort de son père en 1805, elle alla habiter Southampton avec sa mère et sa sœur, et après quatre années d’un séjour sur lequel on n’a aucun détail, les trois femmes s’établirent à Chawton, dans un cottage que leur offrait Edward Austen, second fils du recteur de Steventon, que la succession d’un cousin avait enrichi.
Ce fut là que miss Austen retoucha et publia les ouvrages qui devaient la rendre célèbre et dont quelques-uns étaient composés depuis un certain temps. Dès 1797 en effet, elle avait chargé son père d’offrir le manuscrit « d’Orgueil et Préjugés » à un éditeur en renom. Celui-ci n’avait fait qu’une seule infraction à une tradition aussi vieille que le monde ; il s’était hâté de décliner l’offre par le retour du courrier. Le sort d’un autre roman avait été plus humiliant encore. L’auteur l’avait vendu pour dix livres sterling à un libraire entreprenant de Bath qui, manquant de courage au dernier moment, avait mieux aimé perdre cette somme que de risquer la publication de « Northhanger Abbey ». Ces deux tentatives malheureuses ne découragèrent pas la jeune fille au point de lui faire brûler ses œuvres dédaignées. Elle écrivait pour son plaisir bien plus que pour l’honneur ou le profit. Elle remit ses pauvres cahiers dans son portefeuille et attendit tranquillement une occasion plus favorable où des éditeurs moins méfiants.
Une fois installée, et pour toujours, à Chawton, elle reprit ses habitudes paisibles de composition, interrompues on ne sait pourquoi pendant tout le temps qu’elle avait passé soit à Bath, soit à Southampton. Hors sa famille, nul n’aurait pu soupçonner que la petite maison de Chawton renfermait une femme auteur, tant elle réussissait à cacher, même aux yeux des domestiques, le genre d’étude auquel elle se livrait. Comme elle n’avait point de cabinet de travail à sa disposition, elle écrivait, sur un petit pupitre en acajou, couvrant de ses caractères élégants et fermes les étroits morceaux de papier qu’au craquement soigneusement entretenu de la porte d’entrée elle dissimulait rapidement.
Ainsi furent composées les œuvres « Raisons et Sentiments », « Orgueil et Préjugés », « Mansfield Park » et « Emma ». Tous ces romans parurent sans signature, de 1811 à 1816. Ils eurent des lecteurs et même quelques admirateurs, puisque le prince régent fit demander à l’auteur, dont un hasard avait révélé le nom à son médecin, de lui dédier son prochain ouvrage. Quant à la popularité qui s’attache aux écrivains aimés de la foule, elle ne devait pas la connaître. Elle continua de vivre ignorée, heureuse dans sa retraite jusqu’au jour où, à la suite de soucis de famille, elle fut prise d’une fièvre bilieuse qui mina sa constitution. Dès lors elle ne fit plus que languir et s’éteignit tranquillement dans l’été de 1817.
Cette maison est devenue de nos jours un Musée, elle est aujourd’hui un témoignage de sa vie et de ses œuvres.
Au rez-de-chaussée, deux grandes pièces, le Drawing Room où Jane Austen jouait du piano chaque matin avant le petit déjeuner et le Dinning Parlour où l’on peut voir la petite table où Jane travaillait. Dans le vestibule situé entre le Drawing Room et le Dining Parlour, sont exposées les croix que portaient Jane et Cassandra et quelques lettres de Jane.
A l’étage, la chambre de Jane et Cassandra, où l’on peut admirer le beau dessus de lit en patchwork réalisé par les trois femmes, et celle de Mrs Austen ainsi qu’une pièce dédiée à deux de ses frères: Francis et Charles. Dans le corridor, sont exposées les illustrations originales de Hugh Thomson pour « Pride and prejudice » qui datent de 1894.
Les costumes du film « Becoming Jane » y sont aussi exposés.
Un très joli jardin typiquement anglais complète la visite.
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LOCALISATION DE LA MAISON :
Une bien belle promenade.
Je n’ai lu que deux romans de Jane Austen. Ce n’est pas vraiment mon style préféré mais j’ai bien aimé.
Pour la maison, ce nétait pas la peine. Je t’ai dit que je prenais la petite du billet précédent. Tu sais bien la petite cabane de Chateaubriand.
La visite fut un régal. Merci.
J’aime particulièrement le coffret en laque …
C’est amusant, le jour même où tu postes cet article fourni et passionnant, je rédige un petit compte rendu de la biographie de cette grande dame rédigée par Carol Shields.
Merci pour cette belle visite, j’aime énormément Jane Austen et c’est un bonheur de découvrir un peu d’elle à travers cette jolie maison!
@oggy : je n’oublie pas tes demandes
@LF : finalement tes goûts sont simples et il te faut très peu d’espace, mais quitte à choisir une petite cabane, comme tu dis, prends celle dans le jardin de Maupassant ))
@Scheharazade : merci pour la visite !
@Sybilline : te voilà de retour de vacances ! j’avais vu dans ton dernier billet que tu emportais entre autres la biographie de Jane Austen, mais quelle synchronisation
@Sarah-Lou : Merci ! C’est toujours plaisant d’en apprendre un peu plus sur les auteurs qui nous passionnent.
Mes demandes à traiter, ma chère Cavalier :
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Tu as de quoi faire ! 🙂 🙂
Hé ben ! 🙂 🙂 🙂 🙂 🙂
Excellent 🙂 🙂
Me voilà occupée pour l’hiver au moins !
Mais encore faut-il que les maisons existent toujours…
Magnifique !
Je découvre avec ravissement votre merveilleux blog ! J’ai visité récemment le château de Saché. Je rentre de Torquay (ah les jardins de Greenway). Je n’ai plus qu’une envie : m’en aller vers Chawton ! En attendant, je me permets de vous mettre dans mes liens coups de coeur ». Lors de mes mises à jour, je ne manquerai pas de venir me balader dans « vos maisons ».
Bien à vous
@Cath : Merci pour votre enthousiasme et pour le lien ! Votre blog est très intéressant, bravo 🙂
Jane est un auteur que j’ai entièrement lu et relu, ses autobiographies aussi. Les adaptations de ces films ont été vues et revues. Et vos photos de sa dernière demeure, si l’on ne considère pas son dernier déménagement, m’ont émue. Je reviendrai souvent sur cet article, découvrir toujours plus en détail l’univers de cet auteur qui me touche tant.
Encore de l’excellent travail de recherche.
Voilà, tout est dit. On ne peut qu’être ému à se plonger dans l’univers d’un auteur que l’on aime, découvrir son environnement, parfois les objets de son quotidien, un vrai bonheur.
Merci.